L’équilibre des requins

Caterina Bonvicini

Sofia se réveille à l’hôpital après une tentative de suicide. Quelles circonstances ont bien pu pousser la jeune femme à attenter à ses jours ? Il y a tout d’abord un penchant affirmé pour les hommes dépressifs comme elle, mais surtout faibles et lâches, dont son ex-mari Nicola et ses deux amants, Arturo et Marcello. Mais cela ne serait rien sans une histoire familiale pour le moins difficile : son père Ferdinando, océanologue, est absent depuis toujours et lui envoie des quatre coins du monde par Internet de petits films consacrés à la vie des requins, et sa mère Margherita s’est donné la mort alors que Sofia était encore enfant. Déjà précaire, l’équilibre psychique de la jeune femme vacille un peu plus lorsqu’elle retrouve un paquet de lettres que sa mère n’a jamais expédiées et dont la lecture lui ouvre les yeux. Mais les apparences sont trompeuses : Sofia a-t-elle vraiment voulu se tuer ? Ne s’agirait-il pas plutôt d’une seconde naissance ? Porté par un humour dévastateur, un rythme trépidant et une écriture flamboyante, L’équilibre des requins a le courage d’affronter un sujet difficile, la dépression, dans toute sa complexité. Un défi ambitieux que Caterina Bonvicini relève brillamment.

Note : 3 sur 5.

Une plongée sensible et sans jugement, dans les pensées et les comportements de personnes dépressives, bipolaires et suicidaires avec en fin de livre la perspective encourageante, non d’une guérison complète, mais d’un possible retour à un certain équilibre.

En prime , une déclaration d’amour à la ville de Turin et un plaidoyer pour la protection des requins.

Christiane

Les lions de Sicile

Stefania Auci

1799. Paolo et Ignazio Florio quittent leur Calabre natale pour s’installer à Palerme. Passionnés, ambitieux, les deux frères et leur famille n’aspirent qu’à une chose : se hisser parmi les puissants de la ville. C’est compter sans le mépris des Palermitains, qui voient d’un mauvais œil ces étrangers qui « sentent la sueur ». A force d’obstination et de volonté, les Florio, en se lançant dans le commerce des épices, se frayent un chemin qui, un jour peut-être, leur donnera un empire. Mais leur réussite ne les protège pas de drames plus intimes, car Paolo et Ignazio, pourtant unis comme les doigts de la main, aiment la même femme…

Note : 3 sur 5.

Un roman historique qui nous plonge dans l’Italie du 19ème siècle, en Sicile. On y suit une famille de marchands, les Florio, qui aspirent à une vie meilleure et qui feront tout pour provoquer leur destinée.

Contexte géopolitique tendu en Europe et en Italie qui nous embarque dans l’histoire.

Un personnage principal, Ignazio, adorable et attachant mais qui ne compense pas les caractères figés des autres protagonistes. 

Difficile pour moi de m’y attacher.

Julia

Mors tua

Danila Comastri Montanari

Dans la Rome impériale, grouillante et prospère, le sénateur Publius Aurélius Statius, riche patricien et épicurien invétéré, mène une vie facile et insouciante. Mais tout bascule le jour où il découvre sa dernière conquête, une belle hétaïre nommée Corinna, poignardée chez elle. Pour ne pas être accusé du crime et se voir contraint de mettre fin à ses jours, comme le veut la sévère coutume romaine, Aurélius doit à tout prix retrouver l’assassin de la jeune courtisane. Des opulentes domus aux ruelles étroites et puantes de Subure, la ville basse où s’entasse la plèbe, Aurélius, aidé de son amie Pomponia et de l’avisé Castor, plonge au cœur d’une tragédie antique où chacun avance masqué…

Note : 4 sur 5.

Mors Tua de Danila Comastri Montanari plonge le lecteur dans l’Empire romain en pleine crise politique et sociale. Un enquêteur atypique, Publius Aurelius Statius, doit résoudre un meurtre sordide dans un monde corrompu. Suspense, trahisons et mystères garantis !

Giovanni

Plus haut que la mer

Francesca Melandri

1979. Paolo et Luisa prennent le même bateau, chacun de son côté, pour se rendre sur l’Île. Mais ce n’est pas un voyage d’agrément, car c’est là que se trouve la prison de haute sécurité où sont incarcérés le fils de Paolo et le mari de Luisa. Ce dernier est un homme violent qui, après un meurtre commis sous le coup de la colère, a également tué un surveillant en prison, tandis que le premier a été reconnu coupable de plusieurs homicides politiques sur fond de révolution prolétarienne. L’homme et la femme ne se connaissent pas, Paolo est professeur de philosophie, mais il n’enseigne plus ; Luisa, elle, est agricultrice et élève seule ses cinq enfants. À l’issue du voyage et de la brève visite qu’ils font au parloir de la prison, ils ne peuvent repartir comme ils le devraient, car le mistral souffle trop fort. Ils passent donc la nuit sur l’Île, surveillés par un agent, Pierfrancesco Nitti, avec qui une étrange complicité va naître. Pour ces trois êtres malmenés par la vie, cette nuit constitue une révélation et, peut-être aussi, un nouveau départ.

Note : 5 sur 5.

Italie, les années de plomb. Sur une île abritant une prison de haute sécurité, un huis-clos entre trois êtres écorchés par la vie et par cette vague de violence qui traverse le pays. Et au bout du tunnel, la résilience. Ce roman est magnifique par son écriture et par les blessures qu’il parvient à exprimer

Isabelle

Si c’est un homme

Primo Levi

Interné à Auschwitz de 1943 à 1945, Primo Levi livre ses souvenirs empreints de dignité qui sont aussi une réflexion morale sur la douleur, sublimée en une vision de la vie. Publié pour la première fois en 1958 en Italie, ce récit est un des premiers témoignages sur les camps de concentration nazis.

Note : 4 sur 5.

Témoignage édifiant d’un jeune juif italien déporté au camp d’Auschwitz à la fin de la guerre. Une plongée dans le quotidien d’un camp de travail hiérarchisé où les détenus sont dépossédés de toute humanité. Seuls l’espoir et la résilience permettent de survivre un jour de plus dans cet enfer. « Si la littérature n’est pas écrite pour rappeler les morts aux vivants, elle n’est que futilité ». 

Catherine

Sofia s’habille toujours en noir

Paolo Cognetti

Depuis toujours la vie est une guerre pour Sofia. Une guerre contre sa famille, ses proches, contre le monde entier. Inquiète, débordante, excentrique, insaisissable, Sofia est toujours habillée en noir. Et son humeur aussi est souvent revêtue de noir. Pourtant elle fascine tous ceux qui l’observent depuis le jour de sa naissance. L’infirmière penchée sur sa couveuse ; le compagnon de jeu, Oscar, captivé par le monde des pirates ; la tante Marta, une militante d’extrême gauche un temps exilée à Paris ; les parents enfermés dans un quotidien traversé de tensions silencieuses. Chacun d’entre eux tente de s’inscrire dans le mouvement du monde. Des ghettos résidentiels s’installent en bordure des villes, le tissu industriel se défait, la politique perd de son aura. Et Sofia, fille unique de la petite bourgeoisie, semble flotter dans ce monde qui en trente ans, depuis les années 70, a profondément changé.

Note : 3 sur 5.

L’histoire de Sofia enfant, ado et jeune adulte. On y évoque la vie à Naples dans les années 1970, New-York et même Paris. Sofia fragile, exubérante, insatiable et téméraire. Joli portrait même si la lecture était parfois longue.

Sandrine

Mr Gwyn

Alessandro Baricco

Romancier britannique dans la fleur de l’âge, Jasper Gwyn a à son actif trois romans qui lui ont valu un honnête succès public et critique. Pourtant, il publie dans The Guardian un article dans lequel il dresse la liste des cinquante-deux choses qu’il ne fera plus, la dernière étant: écrire un roman. Son agent, Tom Bruce Shepperd, prend cette déclaration pour une provocation, mais, lorsqu’il appelle l’écrivain, il comprend que ça n’en est pas une : Gwyn est tout à fait déterminé. Simplement, il ne sait pas ce qu’il va faire ensuite. Au terme d’une année sabbatique, il a trouvé: il veut réaliser des portraits, à la façon d’un peintre, mais des portraits écrits qui ne soient pas de banales descriptions. Dans ce but, il cherche un atelier, soigne la lumière, l’ambiance sonore et le décor, puis il se met en quête de modèles. C’est le début d’une expérience hors norme qui mettra l’écrivain repenti à rude épreuve.

Note : 5 sur 5.

Bon livre à lire sans se prendre la tête mais si on veut quand même un temps soit peu réfléchir au sens de la vie, de la carrière et ne pas vivre comme un petit robot un train train quotidien bien rôdé. Quand l’habitude fait horreur, il est temps d’en changer !

Brigitte

Les huit montagnes

Paolo Cognetti

« Quel que soit notre destin, il habite les montagnes au-dessus de nos têtes. »
Pietro est un enfant de la ville. L’été de ses onze ans, ses parents louent une maison à Grana, au cœur du val d’Aoste. Là-bas, il se lie d’amitié avec Bruno, un vacher de son âge. Tous deux parcourent inlassablement les alpages, forêts et chemins escarpés. Dans cette nature sauvage, le garçon découvre également une autre facette de son père qui, d’habitude taciturne et colérique, devient attentionné et se révèle un montagnard passionné.
Vingt ans plus tard, le jeune homme reviendra à Grana pour y trouver refuge et tenter de se réconcilier avec son passé.
Hymne à l’amitié, histoire familiale, ce texte splendide nous fait aussi et surtout ressentir la force de la montagne, personnage à part entière, capable de bousculer des existences et de transformer des êtres.
Un livre de vie, puissant, universel, où le désenchantement et le doute sans cesse se confrontent à l’émerveillement et à l’espoir.

Note : 3 sur 5.

L’auteur nous emmène en montagne sur les traces de Pietro et de Bruno, amis depuis l’enfance. Il est question des relations entre parents et enfants, en particulier entre Pietro et son père qu’il n’a jamais vraiment compris. On a là un des fils conducteurs du récit, qui se mêle à un autre, plus fort encore : l’amitié entre Pietro et Bruno.

L’auteur nous fait vivre la montagne à travers la description, toujours très factuelle, des randonnées des personnages, des travaux de rénovation de la bâtisse presque en ruines, de la vie quotidienne de Bruno et sa compagne.

Cependant, tout cela reste un peu désincarné, les relations sont surtout marquées par une certaine distance entre les personnages, qu’ils soient principaux ou secondaires. Seules la mère de Pietro et la compagne de Bruno font un (petit) peu exception.

Les dimensions « amitié » et « apprentissage » mises en avant par divers critiques sont, pour moi, écrasées par la force de la montagne qui, selon le cas, finit par écraser ou rejeter les personnages.

Stéphan

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