Un petit chef dâĆuvre, parce que lâauteur nous a non seulement fait pĂ©nĂ©trer dans le quotidien de ce couple, mais nous vivons avec eux, partageons leur vie. Il y a une parfaite harmonie entre le dĂ©cor des lieux et la vie des personnages. Ceux-ci Ă©voluent dans un dĂ©cor sombre et sinistre, miroir de leur propre vie .
Elle a tuĂ© le chat, il a arrachĂ© les plumes de la queue du perroquet : le volatile en est mortâŠet la guerre est dĂ©clarĂ©e.
Câest lâhistoire de deux ĂȘtres qui ne vivent pas ensemble mais lâun Ă cĂŽtĂ© de lâautre. Ils ne peuvent pas se rencontrer, mais ils ne peuvent pas se passer lâun de l âautre. lls ruminent leur haine, leur hargne, sâadressent des paroles fĂ©roces, ou plutĂŽt sâĂ©crivent, ils ne se parlent plus. Câest devenu lâobjet de leur vie ; se faire mal, se dĂ©chirer. Câest un jeu, chacun a son rĂŽle, chacun a besoin de se nuire. « ils sont lĂ Ă la tombĂ©e de la nuit dâhiver ; lâun fait semblant de dormir, lâautre tricote. Ils sâobservent sans en avoir lâair, ils se narguentâŠ.
Leur vie quotidienne est monotone, chaque jour est pareil, chaque jour ça recommence, sans aucune surprise. Bref, ils usent le temps
Ils vivent des heures vides sans couleur, sans ombres ni lumiĂšres
Ce que jâapprĂ©cie chez Simenon, câest cette photographie des lieux dans lesquels il plante son sujet.
Tout comme lâamour, la haine unit parfois deux ĂȘtres
Et lĂ , chacun joue son rĂŽle ; se nuire, se dĂ©chirer, sâhumilier tels sont les enjeux.
Le Soir
2003
158
II avait lùché le journal, qui s'était d'abord déployé sur ses genoux puis qui avait glissé lentement avant d'atterrir sur le parquet ciré.
On aurait cru qu'il venait de s'endormir si, de temps en temps, une mince fente ne s'était dessinée entre ses paupiÚres.
Est-ce que sa femme Ă©tait dupe ?
Elle tricotait, dans son fauteuil bas, de l'autre cĂŽtĂ© du foyer. Elle n'avait jamais l'air de l'observer, mais il savait depuis longtemps que rien ne lui Ă©chappait, pas mĂȘme le tressaillement Ă peine perceptible d'un de ses muscles.
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